La Cuisinière et la Poule Nicolas Grozelier (1692 - 1778)

Une Poule bien élevée,
Douce, familière et privée,
S'adonna par hasard à certaine maison.
La Cuisinière en la voyant, dit bon :
Tu viendras- dans mon pot. Elle lui fait caresse,
Lui donne du grain et l'engraisse.
Sans soupçonner-la-moindre trahison,
La Cocote choyée et tout au mieux servie,
Se félicitait de son sort,
Et prenait fort en gré la vie ;
Le jour fatal arrive. Elle aussitôt s'écrie
Qu'on viole les droits de l'hospitalité :
Que la faire mourir, c'est noire perfidie,
Et l'excès de la cruauté.
Pour désarmer la Cuisinière,
Elle a recours encore à là prière.
Faible moyen. On ne l'écoute pas.
Sa mort était conclue, elle passa le pas.
Lorsqu'en faisant du bien, c'est l'intérêt qui guide,
Sous un air séduisant on cache un cœur perfide.
Craignons ce dangereux appas.

Livre II, fable 7




Commentaires