C'est un fait avéré, que plusieurs animaux
Sont sensibles à l'harmonie.
Au son de la musette et des doux chalumeau
On voit bondir dans la prairie
Et les brebis et les agneaux,
Et les chèvres et les chevreaux,
Au printemps, sur l'herbe fleurie»-
L'Âne même est touché, dit-on,
Des charmes de la symphonie,
Et prête l'oreille au beau son
D'une agréable voix aux instruments unie.
Ce goût pour les accords et ce vif sentiment
N'annonceraient-ils pas quelque discernement ?
Chez son maître de flûte un Écolier novice
Était allé prendre leçon.
Il préludait attendant l'exercice,
Et faisait de ses airs, retentir la maison.
Il jouait avec complaisance,
Fort satisfait de sa courte science,
Croyant ne pas faire un faux ton.
Cependant un Barbet, couché sur une chaise :
D'entendre jouer faux, étant mal à son aise,
Et n'y pouvant tenir, commence d'aboyer.
Le Auteur apprentis, quoique ce bruit l'ennuie,
Ne veut pas- quitter la partie,
Et le Barbet se met de plus belle à crier.
Alors survient le maître à cette mélodie ;-
II fait taire le chien et tance l'écolier.
Vraiment votre cacophonie
Ne peut manquer, dit-il, de choquer mon Barbet ;
Vos tons faux, de ses cris font l'unique sujet.
Il a l'oreille sûre et le goût très critique ;
Le moindre faux ton en musique
Fait souffrir son discernement.
Vous allez voir bientôt comment
Il devient attentifs et et montre tranquille
Quand on sait jouer juste et dans le mouvement.
Le maître prend la flûte et d'une main habile
Dirigeant les savants accords
Que son souffle léger fait naître avec adresse,
Le Barbet aussitôt entre dans les transports
D'une douce et tendre allégresse :
II vient flatter son maître et lui faire caresse.
Le jeune homme confus, reconnaît son erreur,
Et cède au Barbet tout l'honneur.
En vain par un air d'assurance
On en veut imposer à des yeux clairvoyants ;
On ne passe jamais que pour des charlatans :
La modestie et l'humble défiance
Sont Pastiche des vrais savants ?