— Je ne veux plus de mes Furies.
Dit à Mercure un soir le Dieu du noir séjour,
Je m'aperçois de jour en jour
Qu'elles n'out point assez d'ardeur, de barbaries.
D'ailleurs leurs bras n'ont plus la force, la vigueur
Que je veux qu'on emploie à punir le pécheur.
Va donc demain matin, va là-haut sur la terre,
Et cherches-y, cher messager,
Pour cet important ministère,
Trois femmes qui sauront sans pitié fustiger.
Junon, le lendemain, disait à sa suivante :
— Je veux à Vénus qui se vante
D'avoir, sans nulle exception,
Soumis tout le beau sexe à son galant empire.
Donner une bonne leçon.
Pour prouver ce que je désire,
Il me faudrait, Iris, trois filles de trente ans,
À l'œil froid et sévère, et surtout, tu m'entends,
Ne perd pas ce point-là de vue,
D'une chasteté reconnue.
Va-t-en chez les mortels : on peut les rencontrer.
Ou du moins je me plais encore à l'espérer.
Iris, après avoir, de son aile légère,
En tous sens parcouru l'un et l'autre hémisphère,
Revient seule. — Eh ! quoi donc, lui demande Junon,
N'as-tu pu les trouver ? 0 malédiction !
Quelle corruption immonde
Offre donc maintenant cette machine ronde !
— J'aurais pu, répondit Iris,
Vous procurer trois chastes filles
De l'âge et de l'humeur que vous m'avez prescrits,
Exemptes en un mot des moindres peccadilles,
Mais hélas ! j'arrivai trop tard !
Pour le Dieu des sombres rivages,
Mercure, me dit-on, ô trop fâcheux hasard !
Venait de les conduire aux infernales plages.
— Trois chastes filles qui, dis-tu,
A l'amour n'ont jamais nullement répondu,
Ont fui toutes galanteries !
Mais qu'en veut donc faire Pluton ?
— Il veut, Déesse, assure-t-on,
Par elles remplacer ses trois vieilles Furies.
Imité de Lessing