— « Joyeuse hier, triste aujourd'hui,
D’où vient, chère enfant, ton ennui ?
— « J'étais hier joyeuse et vive,
Oh ! bien joyeuse ! arbuste favori
Qu’avec tant d'amour je cultive,
Mon beau rosier avait fleuri ;
Mais la fleur a peine est éclose
Et déjà la voici mourant.
Ma fille, elle a vécu ce que vit une rose,
L’espace d'un moment.
De la beauté cette fleur est l'image ;
La beauté ne dure qu’un jour ;
Souvent même un souffle d'orage,
Pour l'abattre, hélas ! au passage,
Du soir n’attend pas le retour ;
Mais si la beauté, fleur fragile,
Aux frêles roses s’assimile,
Plus digne d’hommage et d’amour,
Je sais, ma fille, fleur suave,
Voilant d’ombre son doux éclat,
Sur qui le temps n’eut jamais droit d’épave,
Que jamais l’orage n’abat ;
Cette fleur, toujours fraiche et belle,
Sous le nom de vertu dans notre ceeur fleurit. »
Fleur de beauté brille et périt ;
Fleur de vertu naît immortelle.
Frais-Vallon, 7 avril 1854.