Un hibou, docteur liypocondre,
Toujours analysant et le bien et le mal,
Calculant le moment fatal
Où la terre et le ciel viendraient à se confondre,
Triste et solitaire en son tronc,
Se lamentait sur toute la nature.
« Las ! dit-il, le bonheur !... où se trouve-t-il donc ?
L'existence est à charge à toute créature !... »
En cet instant passait un joyeux rossignol ;
Son chant était plein d'allégresse.
Vif et léger, il suivait en son vol
Sa compagne, ivre de tendresse.
Sous un ciel pur, fuyant l'ardeur du jour,
11 venait dans un frais bocage
Célébrer, dans son doux ramage,
Le plaisir et l'amour.
« Oiseau frivole ! quoi ! lui dit le solitaire,
Quoi ! peux-tu tant te réjouir,
Quand cette vie est pleine de misère !
Tout est vain, trompeur, sur la terre...
Les sots, du moindre éclat, se laissent éblouir ;
Tremble... la mort, riant de ton ivresse...
— Mon cher, nous l'attendons tous deux,
Moi chantant, toi pleurant, dans ta folle sagesse.
Qui de nous est le plus heureux ? »
Riche ou pauvre, grave ou volage,
Le plus heureux, seul, est un sage.