Aux crevasses d'un noir donjon,
D'un vieux manoir dernière et tremblante ruine,
Un arbuste avait pris racine.
Comment y vint le sauvageon ?
Ma foi, je ne sais trop... d'un pépin, j'imagine,
Qu'aura quelque choucas, allant dormir un soir,
Entre ses doigts porté là-haut sans le savoir.
Naître sur un donjon, quelle noble origine !
A toute heure du jour aussi fallait-il voir
Le nabot se targuer d'être un grand personnage,
D'un ton rogue et dominateur
Apostrophant de sa hauteur
Tous les arbres du voisinage.
« Respect à moi, là-bas ! je suis votre Seigneur ! »
Leur criait-il.
- Pour sa grandeur
Le sot végétal prenait celle
De la masure, son soutien,
Qui, croulant tout-à-coup, ne prouva que trop bien
Au pauvret, entraîné dans sa chute avec elle,
Que par lui-même il n'était rien.

Livre III, fable 15




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