L'Homme des destinées Victorin Fabre (1785 - 1831)

«... Telle est ma volonté, que tel soit le destin.
Des flammes et du fer ! qu'on brûle et qu'on immole. »
Il disait : et, la flamme et le fer à la main,
Vingt mille bras, aidés par cent foudres d'airain,
Forçant la destinée à subir sa parole,
Sur des remparts brisés lui frayaient un chemin.
Pourquoi détourner le visage ?
Est-ce le temps des pleurs ? craignez-vous que vos yeux
Rencontrent sur ses pas la vapeur du carnage ?
Non ; voici l'encens pur qui s'élève en nuage :
Le vainqueur prépare des jeux.
Il invite le ciel à ces fêtes royales.
Le sourire à la bouche, et le monde à ses piés,
Le voilà sur son char. Ses pompes triomphales
Évoquent des vaincus les månes effrayés ;
Et, troublant leur repos par un dernier outrage,
Une seconde fois, il renverse en image
Ces remparts foudroyés.
Un insecte rampait sur le char de victoire.
Ébloui de l'éclat dont brillait le héros,
Il sentit dans son cœur l'aiguillon de la gloire,
Et, jaloux Thémistocle, en perdit le repos.
« Quels honneurs, disait-il ! c'est le dieu de la guerre !
Le monde, à ses genoux, l'adore avec effroi.
Il n'a plus de rivaux. Plus ? ah, si j'étais roi !
Je voudrais... Je le veux. Le vainqueur de la terre
Est un rival digne de moi.
Guerrier superbe ! un mot. A nous deux la querelle !
L'univers, moi vivant, n'est pas encore à toi.
En combat singulier voici que je t'appelle ! >>
Il dit, vibre son dard, pique. -Le lendemain,
Le chant des morts succède à l'hymne des batailles :
Et le plomb du cercueil, le lin des funérailles,
Voilà tout ce qui reste au nouveau Saladin.

Fable 11




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