Un brillant Ananas étalait sa splendeur
Près d'une triste Nèfle aux destins sans honneur.
« De moi, disait la Nèfle, on se plaît à médire ;
Un prétendu bon ton me traite avec dédain.
On me repousse , on vous attire,
Et l'on fait de vous seul l'ornement d'un jardin !
Enfin, si l'on vous mange, au moins on vous admire ;
Et moi, Fruit méconnu, dans les champs confiné,
Je mûris, mais sans gloire, et meurs abandonné !
Merveilleux Indien, favori de Pomone,
Que vous êtes heureux ! vous êtes couronné !
C'est ce diadème qui donne
L'éclat dont vous êtes orné ? »
L'Ananas répondit : « Quand on connaît l'envie,
Et quand on accuse le sort,
On est bien malheureux ; aussi je vous plains fort
De tous les incidents qui troublent votre vie.
Mais vous calomniez beaucoup votre voisin,
Au sujet des honneurs dont l'éclat l'environne :
Tout mon mérite est dans mon sein ;
Mon prix n'est pas dans ma couronne.
AU ROI LOUIS-PHILIPPE,
Sire, lorsque je retraçais
La réelle valeur que le mérite assure,
Je cherchais une image au sein de la nature,
Mais c'est à vous que je pensais.