Le Loriot et le Moineau Antoine Vitallis (1749 - 1830)

Compère loriot Et son ami pierrot Donnaient sur les cerises, Mûres ou non ; ils n’y regardaient pas : Les fripons les trouvaient exquises. Le maître du jardin eut beau tendre des lacs , Et chaque jour changer d’appas , A tous les grains cerises préférées, Par les oiseaux étaient toujours croquées, Ou toutes au moins becquetées. Voyant donc que rien n’y fesait, Maitre Jean , d’un large filet, A maille bien serrées » Enveloppant chaque arbre où le nuit abondait, Crut, pour le coup, ses cerises sauvées. Le loriot était de ces plu? fins ; Gourmand au moins autant qu’habile ; Un vrai renard de la gent volatile. Trouvant donc un de ces matins Son déjeune mis sous les grilles, Comme l’on y mettait, chez nous, certaines filles Pour les soustraire aux grilles des malins ; Le fui matois ne se tint pas pour dupe, Et s’adressant à son ami pierrot Que l’avanture avait rendu tout sot : Un projet, lui dit-il, m’occupe : Tandis que je ferai le guet, Toi, dont le petit corps se met Dans un petit trou de muraille, Tu pourras, en cherchant, rencontrer quelque niai Un peu plus large, et qui dans le filet Te permettra d’entrer ; essaye , allons, courage : Une fois introduit, Des pieds, du bec, tu feras rage : Point de quartier ; grand abattis de fruit ; Quand la terre en sera couverte. Moi, d’aller à la découverte , Et toi, de t’en gorger à ton aise et sans bruit. Je me croirai d’ailleurs bien payé de ma peine Si, par mes soins et mes conseils, Je peux te procurer une aussi bonne aubaine. — Le moineau, comme ses pareils, Etait pétulant, téméraire , Grand amateur sur-tout de bonne chère: Le voilà donc , autour d’un cerisier , Voltigeant, essayant, d’un côté, puis d’un autre, Tant qu’à la fin, parvenant au fruitier. Il y fit tel dégât, tel tour de son métier, Que loriot, le bon apôtre, Des cerises mises à bas , Eut pour sa part le meilleur des repas. Jean , par malheur, sur l’entrefaite Arrive avec son arbalète : Loriot de s’enfuir : pierrot le tente envain ; Il a perdu la trace du chemin , Et le filet lui coupe la retraite. Jean l’apperçut et le tua du coup. Chez nous , en pourpoint comme en jupe , De ces moineaux on voit beaucoup ; C’est l’espèce qu’on nomme dupe.





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