Le Laboureur et les Étourneaux Babrius (Ier - IIème siècle)

Les Pléiades se couchaient ; c'était le temps des semailles. Un laboureur venait de jeter le grain dans ses sillons, et restait pour le garder. Survinrent des geais au noir plumage, troupe innombrable et criarde, et avec eux des étourneaux, fléau des semences. Un jeune enfant suivait le laboureur, une fronde à la main. Les étourneaux écoutaient, et lorsque notre homme, sans autre malice, demandait sa fronde, ils fuyaient avant qu'il l'eût prise. Le laboureur imagina une autre finesse, et fit la leçon à l'enfant. « Mon ami, lui dit-il, avec cette race rusée il faut user de ruse. Lorsqu'ils viendront, je te demanderai du pain ; toi, au lieu de pain, tu me donneras la fronde. » Les étourneaux revinrent, et ils saccageaient le champ. L'homme demanda du pain, comme il en était convenu ; les étourneaux ne fuyaient pas. L'enfant lui donna la fronde pleine de pierres ; le vieillard les lança et attrapa qui à la tête, qui à l'épaule, qui à la patte. Ils prirent aussitôt la fuite. Des grues qui les rencontrèrent leur demandèrent ce qui était arrivé. Un geai leur dit : « Fuyez les hommes, fuyez cette race scélérate ; ils savent parler entre eux d'une façon et
agir de l'autre. »

Les gens rusés sont une dangereuse espèce.

Fable 33




Commentaires