Le monde comptoit plusieurs âges ;
Et point de Phénix jusques-là.
Ce prodige enfin se montra,
Et vint enchanter les bocages.
Des champs, des forêts et des eaux,
On vint pour voir son Excellence ;
Il n'est pas jusqu'aux étourneaux
Qui ne l'admirent en silence.
Les Quadrupédes, les Oiseaux
Sont stupéfaits en sa présence :
Mais les plus sensibles d'entr'eux ;
Après cette premiere ivresse,
Dirent bientôt avec sagesse :
Sa beauté n'est qu'un don affreux,
Puisqu'il est seul de son espéce.
Pauvre Phénix ! ah ! malheureux !
Quel astre cruel t'a vu naître ?
Au plaisir ton cœur est fermé :
Tu ne pourras jamais connaître
Le bien d'aimer et d'être aimé.

Livre I, fable 9




Commentaires