Lorsque Pygmalion, sous sa main trop savante,
D'un marbre que l'amour toucha de son flambeau
Sentit la forme vivre et la chair frémissante
Repousser le ciseau,
Il aima son ouvrage, il jouit de son rêve ;
Il commença le jour qui jamais ne s'achève,
Le jour de l'amour éternel :
Tant d'orgueil palpitait dans son sein paternel !
La fable ne dit pas comment finit l'histoire ;
Voulez-vous l'apprendre, en voici
Le dénouement en raccourci.
D'abord ce furent des caresses,
Des transports, de folles ivresses !
La statue animée avait des yeux ardents
Et des lèvres toujours avides,
Des couleurs riches et splendides ;
Mais c'était du marbre dedans,
C'était un beau front sans pensée :
Sa bouche était brûlante et son âme glacée.
Un jour, en s'éveillant, le statuaire eut peur ;
Il crut n'avoir fait qu'un vain songe,
Son bonheur lui parut un douloureux mensonge.
Il quitta Galatée avec un cri d'horreur :
Pourtant elle était toujours belle,
Rien ne prouvait encor qu'elle fût infidèle.
Que lui manquait-il donc ? – Un cœur.
Oh ! pauvres amoureux de nos filles de marbres !
On trouvait autrefois des nymphes dans les arbres,
Mais on trouve aujourd'hui bien plus souvent, je crois,
Des écorces de femme avec des cœurs de bois.
Symbole 3 :
L’amour est une toute-puissance lorsqu’il s’agit de réaliser le possible, c’est une fatalité et un vertige mortel lorsqu’il s’obstine à la réalisation de l’absurde.
Ce que vous voulez avec amour vous le pouvez si la nature le peut, c’est-à-dire si votre volonté n’est pas en désaccord avec l’éternelle raison.
Les transformations de la magie et de la chimie hermétique ne sont que le développement artificiel des germes naturels. On ne fait pas de l’or, on aide la nature à en faire.
Le problème résolu par la magie d’Hermès est celui-ci :
« Accumuler et fixer dans un corps artificiel le calorique latent, de manière à changer la polarisation moléculaire de corps naturels par leur amalgame avec le corps artificiel. »
Celui de la magie prodigieuse peut se formuler ainsi : « Déprimer ou exalter le principe des formes de manière à en changer les apparences. »
On voit par cette définition que les prodiges de la magie fascinatrice ne sont en effet que des prestiges.
On peut s’exalter au point de prendre une statue pour une femme. Mais on ne fera jamais en réalité qu’une statue soit une femme, ni qu’une femme soit une statue.
On peut monter la tête d’une fille de marbre et la faire agir comme si elle aimait ; on ne lui donnera jamais un cœur.
Jouir des illusions sans en être dupe, là est le grand arcane de la magie.
Celui qui crée l’illusion sans la subir commande au vertige et à l’enfer ; celui qui la subit est entraîné par le vertige.
L’un est le magicien qui enchaîne le diable, l’autre est le sorcier à qui le diable finit toujours par tourner la tête et tordre le cou.