Un mandarin d’un district invita un jour un de ses secrétaires à boire avec lui un verre de vin.
Un arc peint en rouge était accroché au mur, et, par un hasard extraordinaire, il se reflétait juste au fond du verre du secrétaire. Celui-ci crut y voir un petit serpent s’agitant dans le vin et réprimant le dégoût qui lui montait aux lèvres, il avala le vin d’un trait, craignant d’offenser son supérieur en refusant de boire.
De retour a la maison, il eut des coliques, perdit l'appétit, maigrit a vue d’œil. Tous les efforts entrepris pour le guérir s’avérèrent inutiles.
Averti de cet état de chose, le mandarin vint le voir.
— J’ai avalé un serpent qui se trouvait dans mon verre, lui dit le malade, le jour ou vous m’avez fait l'honneur de m’inviter à boire chez vous, c’est ce sou- venir qui me rend malade.
Le mandarin examina sa salle d’audience et lorsque ses yeux tombèrent sur l’are suspendu au mur, il comprit tout.
Il envoya chercher le malade en voiture. On le fit asseoir à la place qu’il avait occupée la première fois, un verre devant lui. Et l’on regarda: le prétendu serpent était au fond du verre.
— C’est pour sûr le reflet de arc que vous avez vu. Il est impossible qu’un serpent se trouve dans un verre rempli de vin.
Soulagé, le secrétaire ne tarda pas à recouvrer la santé.