Des évènements politiques
(Ce mot fait présager soudain quelque malheur)
Avaient jeté la douleur,
Froissé de plus intérêts domestiques
Chez un noble pélican.
En pareil cas, un courtisan
Se tourmente
Auprès du nouveau pouvair ;
Il adule et complimente ;
Sa main devant l'idole agite l'encensoir.
De tout temps, les oiseaux de proie
Ont suivi cette voie.
En s'éloignant de la cour,
Le pé'ican dans les bois se retire :
S'il soupire
Et dit sa plainte aux échos d'alentour,
Ce n'est pas qu'il regrette
Et titres et honneurs ;
Le sort de ses fils l'inquiète
Et fait couler ses pleurs.
Etat voisin de l'indigense
Succède à l'abondance
D'autrefois.
Jour et nuit dans les bois
L'oiseau pour sa couvée
S'empresse, va, vient et revient.
Le courage soutient,
Par le malheur éprouvée,
Une grande âme; et souvent
L'héroïsme
Et le civisme .
Font moins que coeur aimant.
Mais l'hiver et sa froidure
Ont dépouillé la nature
De ses trésors :
Donc plus moyen de chercher la pâture
Dehors.
Pour l'oiseau quelle torture
Alors !
Mère jamais ne balance
A donner assistance
A ses enfants...
Voyez-vous jeunes pélicans
Sucer le sang de leur mère !
C'est le dernier secours
D'un bon cœur : l'oiseau réitère
Ce moyen qui bientôt a terminé ses jours.
Contre ce fait que censeur ne réclame ;
Autrement je pourrais, madame,
Consigner dans mes vers
Mille exemples divers:
Point n'est besoin pour âme tendre.
Bons fils ne peuvent se méprendre
Sur le portrait que j'ai tracé,
Je dois dire esquissé.
Car comment d'une mère,
Ange tutélaire
Que nous accordent les dieux,
Peindre l'amour mystérieux?
Je me tais et j'admire...
Ah! que ne puis-je dire,
En vers harmonieux,
Ce suave sourire,
Ce céleste délire,
Ce langage des yeux;
Charmes dont la nature
Orna le cœur maternel !
Ce cœur, c'est un autel
Où brille flamme pure;
C'est un foyer éternel
Où rien ne meurt, où tout s'épure ;
C'est le séjour de la candeur ;
C'est festin que l'amour apprête
Pour le juste et pour le pécheur :
Comme le fils aimant, le fils dissipateur
A cette table s'arrête ;
Son retour complète la fête
Du bonheur.
Cœur d'une mère
C'est un mystère !
C'est un sacrificateur
Qui sur le sein de la patrie
Pose, sans balancer, son présent et sa vie,
Son avenir, sa gloire et son honneur,
Son fils! sublime courage!
Quel langage,
Tendre mère, peindrait ta générosité !
De l'immortalité
Tu placerais le privilège
Sur l'autel
Pour en doter ton fils, s'il n'était immortel...
Enfants bercés sur le cœur maternel,
Ne craignez rien; Dieu vous protège.