Le Lièvre Fortuné Nancey (? - 1860)

La guerre un jour était aux champs,
Entre les animaux que limites de plaine
Ou peut-être bien quelqu'Hélène
Avait divisés en deux camps.
Comme le jour de la bataille,
On les voit tous frapper et d'estoc et de taille,
Pour eux et la grifse et la dent ;
Et comme chacun d'eux comprend
En affrontant plus d'une entaille..
Que tout brave jamais, ne fuit ni ne se rend.
Qui demeura vainqueur, pour le but où j'aspire
Nul besoin ici de le dire.
Ce qu'il convient seulement de savoir
C'est que le lièvre seul ne fit pas son devoir.
Caché dans un sillon et l'oreille aplatie,
On le vit comme un lâche éviter la partie ;
Puis le danger passé, s'oser mettre en chemin,
Pour venir exiger large part du butin.
Mais qu'a donc fait le misérable
Pour prendre ainsi sa place à table ?
Oh ! dit-il, lorsqu'on sait qu'on n'est pas le plus fort,
Avec raison on peut craindre la mort.

Les gens peureux aiment à vivre ;
Mais encor que sans droit il vienne partager
L'exemple de ce lièvre esquivant le danger,
N'est pas assurément celui que l'on doit suivre.
Il en est pourtant que je sais
Qui feraient comme lui ; ceux-là sont-ils Français ?

Livre II, fable 19




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