Un Géant, sur son chemin,
Fit la rencontre d'un Nain ;
Bon! dit-il, voila pour faire
Petit plat et bonne chère.
Le morceau parole friand;
Le meilleur expédient,
Pour vérifier la chose,
Est de le manger sans sauce.
Ah ! dit le Nain, Monseigneur,
C’est pour moi beaucoup d’honneur:
Mais à mon heure dernière,
Ecoutez une prière,
Et promettez par ferment
De l'exaucer proprement.
Le Géant aussitôt jure;
Le Nain dit : je vous conjure.
De ne me dévorer pas5
Et s’esquivant de ses bras,
Le petit homme s’échappe :
Mais le Géant le rattrape.
Le Nain criait; justes Dieux,
Qui voyez du haut des Cieux
Ma déplorable aventure,
Vengez-moi de ce parjure.
Mais l'Ogre, en le dépêchant,
Dit : mon ami, le méchant,
Qui n’épargne point son frère,
Des Dieux craint peu la colère.