Un loup se sentait près de son heure dernière,
Et jetant sur sa vie un regard eu arrière,
« Il est vrai, disait-il, que je suis un pécheur ;
Mais, d'être un des plus grands je n'ai pas le malheur,
Nous avons tous, hélas ! quelque vice en partage.
J'ai fait un peu de mal, mais du bien, davantage.,
Un jour, il m'en souvient, un imprudent agneau
Près de moi vint bêlant, séparé du troupeau.
Je l'épargnai, pouvant l'égorger à ma guise.
Une brébis aussi, bête fort mal apprise,
(C'était un autre jour, mais vers le même tems)
M'accablait, sans raison, de propos outrageants,
Me raillait ; j'écoutais avec indifférence ;
Jamais elle ne put lasser ma patience ;
Je n'avais cependant nul chien à redouter.
Ces deux faits sont réels, je puis les attester,
Dit son ami renard (lequel, selon l'histoire,
L'aidait à bien mourir); j'en garde en la mémoire
La moindre circonstance ; et, c'était dans le tems
Où cet os monstrueux t'avait mis sur les dents
Et t'allait étrangler, sans la bonne cigogne
Dont tu payas si bien l'importante besogne. »