Jamais vengeance ni colère
N'ont réparé quelque malheur,
Mais souvent achevé de gâter une affaire
Où la prudence eût été nécessaire
Et non une aveugle fureur.
Un fin Renard s'était fait un passage,
Et croquait Poules et Poulets :
Sa faim croissait dans le carnage.
Le Coq, après avoir fait rage,
Crie au secours, appelle les valets,
Le Maître et tout le voisinage.
Le Maître accourt, voit le ravage,
Et jure la mort du Renard,
Qui tremble à son tour à l'écart,
Mais sans se repentir du mal qu'il a pu faire.
Une Poulette feule et tapie en un coin,
En gémissant, reçoit de loin
Les derniers adieux de sa mère.
Le Renard cherche à s'y glisser,
Et près d'elle cache sa tête.
Le Maître furieux et qui l'a vu passer,
Armé de gros cailloux, aveuglément les jette.
Il manque l'assassin, attrape la Poulette ;
Et le Renard s'enfuit. Lors la pauvrette,
(On recueillit ses derniers mots.)
Toi seul as comblé tous tes maux
Dit-elle au Maître ; en ta disgrâce,
Quoique seule je te restais ;
Et j'étais
Pour rétablir ma race.
Maintenant, j'en conviens, tu dois être fâché :
S'il te faut des œufs frais, va les prendre au marché.