Le Perroquet et l'Enfant

J. F. Roucher (19è)


Un jeune et joli perroquet,
Naguère encor fameux par son caquet,
Avait perdu tout-à-coup la parole.
Un enfant du logis, trouvant cela fort drôle,
Le tourmentait, le provoquait,
Voulait savoir enfin s'il dirait quelque chose ;
Carie marmot s'imaginait
Qu'il s'opérait en lui quelque métamorphose,
Ou que la langue lai manquait.
Mais plus son silence l'étonné
Plus il en veut connaître le sujet :
Puis en lui-même il se disait :
Le drôle babillait presque autant que ma bonne,
Maintenant le voilà muet ;
Il faut qu'il ait perdu la langue,
Car autrement il parlerait.
« Voyons, parlez, monsieur le perroquet ;
Je vous en prie et vous l'ordonne :
« Dites-moi quelque chose, et soudain je vous donne
Et des biscuits et des bonbons ;
Vous savez, que j'en ai de bons. »
Mais hélas ! plus rien ne le tente ;
Il soupire sans dire mot :
Et voilà que notre marmot
S'inquiète, s'impatiente,
Car l'enfance est très-exigeante :
Parlez donc, monsieur l'entêté,
Jadis rempli d'esprit, maintenant hébété;
Répondez…. ou bien je vous tue.
Le perroquet, enfin, craignant pour son salut,
A répondre se résolut.
Il faut pourtant qu'il s'évertue ;
Mais comme il ne manquait de bon sens ni d'esprit
En peu de mots voici ce qu'il lui dit :
Si je ne parle pas, vous m'ôterez la vie,
On viendra me tuer, si l'on m'entend parler,
Car on me l'a promis : or, il me prend envie,

Pour échapper à cette tyrannie….
— De quoi faire ? — De m'envoler.
Il part ; ou va-t-il ? je l'ignore ;
Je crois pourtant qu'il cherche un pays écarté,
Ou l'on puisse tout dire en pleine liberté.
En ce cas, il pourra chercher long-tems encore.





Commentaires