Une vieille et vilaine agace,
Faisant partout triste grimace,
Distillait contre un perroquet
Tout le venin de son caquet,
Elle en critiquait le ramage,
Trouvait à dire à son plumage ;
Et même encor, le croira-t-on ?
Par son pitoyable jargon
Osait blâmer jusqu'à sa cage.
Enfin, selon notre margot,
Le perroquet n'était qu'un sot,
D'elle au contraire satisfaite,
Et se croyant toute parfaite,
Elle ennuyait de ses propos
Un tas de malheureux moineaux.
Ceux-ci, dès qu'elle était partie,
Riaient alors à ses dépens,
Tous condamnaient cette manie
De décrier ainsi les gens.
Pourquoi cette maligne bête,
Disait l'un d'eux peu satisfait,
Vient sur ce pauvre perroquet
Tous les jours nous rompre la tête,
Et vilipender cet oiseau ?
Voici pourquoi, dit un corbeau :
Apprenez que cette harpie
Qui médit avec tant d'ardeur,
Etouffant de rage et d'envie,
Avec un œil de jalousie
Du perroquet voit le bonheur.
En deux mots cela vous explique
Et le motif de sa critique,
Et ses propos et son aigreur.
On voit tous les jours dans le monde
Un si grand nombre de jaloux,
Que de l'agace parmi nous
On croirait que l'espèce abonde.