Du temps que le pays Gaulois
Des Druides suivait les lois,
Et qu'un arbre imposait bien plus de révérence
Qu'on n'en porte aux clochers de France
Aux environs de Caudebec,
Un Piqne-bois, autrement un gros bec,
S'acharnait, un jour, contre un chêne ;
Prenant son bec pour une alêne,
Avec fureur il enfonçait ce dard ,
Comme voulant percer l'arbre de part en part;
Puis on l'eût vu, d'un vol agile,
Faire le tour de cette énorme pile,
Pour examiner les progrès
De tous les efforts qu'il a faits.
Un Hérisson, observant la manœuvre,
Lui dit : Je veux partager l'œuvre ,
Et vous aider de tous les javelots
Dont nature a garni mon dos.
Eh! que veux-tu, lourd quadrupède?
Répond le Pique-bois. C'est un singulier aide,
Qu'un fagot épineux , sans ressort, sans vigueur,
Qui fait moins de mal que de peur.
Ne mettons point ici d'aigreur,
Repart le Hérisson, l'œuvre n'est pas frivole :
Puisqu'il s'agit de détruire une idole ,
Laisse-m'en partager le travail et l'honneur,
Perce-la, crible-la; quand tu seras vainqueur,
Aussitôt je me mets en boule;
L'idole tombera de toute sa hauteur,
Si de tout mon effort, contre elle, je me roule.
Le voyageur trouve encor quelquefois ,
Sur la dure écorce du bois,
Le Pique-bois essayant sa tarière,
Sans se douter des défauts, du moyen.
Un animal, qui ne doute de rien,
Est une bête singulière.
Un pique-bois est un pivert.
Note de l'auteur : Les autels es Druides étaient sous des chênes. L'arbre lui-même était sacré.