Dans une paix douce et profonde,
Un solitaire espérait vivre heureux ;
Tranquille, autant qu'on peut l'être en ce monde,
Il n'avait rien, ainsi point d'envieux.
Sur ses besoins notre mère Nature
Le prévenait, que voulait-il de plus ?
Le cœur de l'homme en toute conjoncture
Est obsédé de désirs superflus.
Ce Solitaire en est un bel exemple :
Il s'écriait sans cesse, ah ! que je fuis joyeux !
Mille beautés que je contemple
Me charment les sens et les yeux ;
Loin de ces Palais somptueux,
Le fond de mon cœur est le temple
Où je sacrifie à mes Dieux.
Mais si dans cette folitude
Je pouvais avoir un ami,
Alors quelle béatitude !
Par ce discours Jupiter attendri
Vint détromper le solitaire,
Et dit, Mortel, qu'oses-tu faire ?
Sois-donc satisfait de mes foins :
Tu voudrais un ami ? Ton erreur est extrême ;
Le Riche n'en a pas, et le pauvre encor moins.
L'homme assisté des Dieux se suffit à lui-même.