L'Ours et le Singe Jean-François Haumont (17** - 18**)

Un singe avec un ours, marchaient de compagnie :
Singe ou méchant, n'est qu'un ; il lui prit fantaisie,
Pour s'amuser dans cette occasion,
De se moquer de son cher compagnon.
Vous avez, lui dit-il, la tournure élégante ;
Vous êtes beau, votre voix est charmante,
Vous avez de l'esprit, vous êtes fort savant.
Vous faites le mauvais plaisant,
Lui répondit la lourde bête,
Et je ne sais ce qui m'arrête
De corriger votre esprit goguenard :
Je voudrais savoir, par hasard,
S'il vous sied bien de parler d'élégance ;
Il n'est point d'animal en France
Plus laid que vous, qui vous croyez si beau :
Quant à la voix, la vôtre est celle d'un corbeau ;
Vos grimaces font peur.
--- Parlez de mon adresse
De mes tours, de ma gentillesse ;
Monsieur l'ours, ce sont des talents
Qui plaisent aux honnêtes gens.
Les bons mots, les espiégleries,
Sont-ils pas nommés singeries ?
Vous voyez bien que je n'ai nul défaut ;
Mais vous, qui n'êtes qu'un lourdaut,
Quand vous dansez, la pitié nous fait rire :
De tous côtés on entend dire
Ce que j'ai dit en peu de mots.
L'ours ennuyé de ces mauvais propos,
Appuie au singe, au milieu de la face,
Un bon soufflet, il fit une sotte grimace.
De la société, pour goûter les douceurs
Proscrivez avec soin tous les mauvais railleurs.

Livre II, Fable 13




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