Un lièvre, sorti de son gîte,
Courait les champs en liberté ;
Et sans songer à mal, s'en revenait bien vite,
Pour se remettre en sûreté.
Mais le malheur survient, hélas ! sans qu'on y pense.
Un lévrier, que l'on nommait Volant,
Paraît dans la plaine, s'élance,
Le voit, le poursuit à l'instant.
Le lièvre fuit, et comme un trait, détale :
Son ennemi court encor mieux,
Le joint ; c'était l'heure fatale
Qui devait terminer son sort trop malheureux.
L'animal craintif et timide
Dit à Volant : quel sujet vous décide
A me porter le coup mortel ?
Que vous reviendra-t-il d'un dessein si cruel ?
Ma dépouille et mon corps seront à votre maître,
Vous serez assassin pour le profit d'un traître !
Mon cher, répond Volant, vous raisonnez très-bien ;
Mais de lâcher ma proie, oh ! je n'en ferai rien ;
De vos raisons et de vous je me moque ;
Ainsi, qu'un autre ou moi vous croque,
Je crois qu'il importe fort peu ;
Manger un lièvre n'est qu'un jeu.
Raison, humanité, sont des mots qu'un corsaire
Ne connaît pas dans son vocabulaire.