Le Renard et le Hérisson Jean-Louis-Marie Guillemeau (1766 - 1852)

Devant le hérisson, le renard se vantait
De posséder plus de cent tours d'adresse,
Et soit par ruse ou par finesse,
De pouvair échapper à qui l'attaquerait.
Pour moi, dit avec modestie,
Le hérisson, je n'ai qu'un moyen pour appui ;
Franchement je vous le confie,
Le renard aussitôt de se moquer de lui...
Mais ils causaient encor lorsque des chiens de chasse,
Attirés par l'odeur et l'ardeur du butin,
Et, très-accoutumés aux tours de passe-passe,
Parurent, tout-à-coup, sur le coteau voisin.
Le hérisson, prudent, recourt à son moyen ;
Il roule sur lui-même en formant une boule ;
Et de ses ennemis, qui paraissent en foule,
Ses piquants, très-nombreux, le défendent si bien,
Que, pour l'atteindre et le surprendre,
Vainement tous les chiens se liguent, sont d'accord,
Et qu'ils furent, enfin, obligés de suspendre
Un inutile et vain effort.
Libre, le hérisson chercha son camarade ;
Mais il le vit au loin, par les chiens, poursuivi,
Traînant le pied, souffrant, malade,
Et déjà, par le sort, sous le joug asservi.
Voilà donc, se dit-il, où tant de tours d'adresse,
Ont conduit aujourd'hui mon pauvre compagnon ?
« Mieux vaut cent fois, je le confesse,
N'en avoir qu'un, mais qu'il soit bon. »

Livre VI, fable 5




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