Un Loup quidam et féroce et vorace,
D'un troupeau décimait la race,
Et dans le fond des bois trouvant un sûr réduit,
Se régalait le jour du butin fait la nuit.
Du Berger, de son Chien l'active surveillance
N'y pouvaient rien ; le Loup faisait bombance
Se moquant à la fois du Chien et du Berger.
Un jour cependant Pied léger
(C'était le nom du Chien) dénicha le repaire
Du Loup. " Voyons un peu, ça, suspendons la guerre,”
Dit-il-" pour un instant cessons d'être ennemis,
Et raisonnons comme deux bons amis."
"Si je ne fais un rêve,
Tu voudrais une trève, "
A dit le Loup, tope-là ; je veux bien."
Alors ainsi parlementa le Chien : -
"Comment comme le tien un esprit intrépide,
Peut-il donc attaquer espèce si stupide ?
Des crocs comme tes crocs devraient du sanglier,
Ouvrir la jugulaire, et c'est t'humilier
Que de chercher si bas en ta sauvage joie,
De mes pauvres tondus à faire ainsi ta proie ;
Les tyrans sont poltrons, aussi bien qu'oppresseurs,
Sois bon; compassion est vertu des grands cœurs."
"Écoute, dit le Loup, et pèse bien ma glose :
Il n'est aucun effet sans cause :
Nature nous a fait des mangeurs fort gloutons,
Voilà pourquoi, mon vieux, nous aimons les moutons ;
Mais si tu veux plaider pour la race bêlante,
Porte à ton maître aussi ta parole émouvante ;
Dis-lui qu'un Loup peut bien croquer parfois
Quelques brebis, quand l'homme en égorge à la fois,
Et centaine et millier.
Et sans qu'il s'en repente,
Mieux vaut franc ennemi
Qu'un faux et qu'un perfide ami."