Les deux Ânes L-S du Ruisseau (16?? - 17?)

Deux Baudets par hasard un jour se rencontrèrent,
L'un chargé de fil blanc et l'autre de charbon.
D'abord sur leur rencontre ils se félicitèrent
Comme le font toujours Gens de bonne maison ;
Ensuite en propos ils entrèrent,
Ce fut sur le sujet des affaires du temps,
On sait que c'est une matière
Sur laquelle l'on peut s'entretenir longtemps.
Le plaisir qu'y goutaient nos gens
Leur faisait sans chagrin supporter la poussière
Que faisaient voler les passants.
Mais dans cet entretien, si doux, si agréable
On les vit tant de fois l'un l'autre se frotter,
Afin de pouvoir mieux s'en dire et s'en conter
Que le fil fut rendu presqu'au charbon semblable.

Dans le commerce des méchants
On contracte toujours quelques-uns de leurs vices.
Leurs discours font des précipices
Où l'on voit trébucher mille et mille Innocents.

Livre II, fable 11




Commentaires