Le Stras et le Diamant fin Le Marchant de Viéville (17?? - 18??)

Un beau Stras à peine échappé
Des mains d'un fameux lapidaire,
D'un éclat qui n'est qu'éphémère,
Paraissait sans cesse occupé.
Près d'un Diamant magnifique
Un jour le Stras disputait de beauté.
« De nos feux la vivacité
N'est, disait-il, qu'un effet prismatique,
Et vous n'avez le pas que par la dureté.
Tous les deux nous ne brillons guère,
Avant d'avoir bien reçu le poli ;
Vos feux font pâlir la lumière,
Les miens la font pâlir aussi. »
Eh ! pourquoi me montrer cette humeur arrogante ?
Lui dit le Diamant ; au lieu de disputer
Et de passer ici le tems à discuter,
Mettons-nous tous les deux en vente,
Et nous verrons lequel doit l'emporter ?
Déjà du Diamant un prix considérable
Est offert par maints connaisseurs.
Tout le monde s'arrête, on le trouve admirable,
Et les passants sont autant d'acquéreurs ;
Loin dépriser le Stras, on fait tout le contraire ;
Et, si l'on y jette un regard,
C'est un simple effet du hasard
Et non du plaisir qu'il peut faire.

Le Stras nous peint ici tous ces petits auteurs,
Aboyant sans jamais se taire,
Et le Diamant fin, lecteurs,
Le grand et sublime Voltaire.

Livre I, fable 14




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