Un gentil martinet
S’était, avec grand soin, au fond d’un jardinet,
Construit un nid de mousse
De fin duvet et de plume fort douce ;
Et s’y trouvant au mieux,
Il y vivait joyeux,
Ne sortant d’aventure
Que pour chercher pâture,
Ou, dans les bois tout près,
S’abriter du soleil et respirer le frais.
Un jour que notre camarade
Faisait sa promenade,
Un de ces moineaux
Qu’on appelle pierrots,
Au naturel vagabond et sauvage,
Découvre dans le feuillage
De noire martinet le délicieux nid,
Et sans gêne s’y blottit.
« Oh ! la douce couchette, »
Dit-il, « et moelleuse et bien faite !
» Martinet, mon ami, dès ce jour
» Dans ton nid je m’installe, et j’en fais mon séjour. »
Celui-ci, vers le soir, à son logis revient,
Il aperçoit l’intrus, lui réclame son bien.
« Ton bien ! » lui dit avec audace
Le pierrot insolent, le regardant en face :
« Je suis chez moi, va-t’en, ou du bec je te chasse. »
Le martinet plus faible aussitôt déguerpit,
Mais, le cœur tout gonflé de rage et de dépit,
Aux oiseaux ses amis raconte l’injustice
Du moineau ravisseur. On vote son supplice,
Et le lendemain tous viennent, dès le matin,
Assiéger le réduit où le moineau mutin,
Tapageur et voleur, se dorlotait à l’aise.
Tous portent à leur bec un peu de terre glaise ;
Ils en scellent la porte, et de cette maison
Ils font une prison
Où du coupable oiseau, privé d’air, de lumière,
Une cruelle mort termina la carrière.
Opprimer les petits est toujours un grand tort,