Le Cerf altéré Léon-Pamphile Le May (1837 - 1918)

Un cerf, ayant un jour fait une longue course,
 Était fort altéré
 Et cherchait une source,
Quand il vit tout à coup, au milieu d’un fourré,
 Une mare profonde
 Que ceignait un rocher.
 Il fut prompt à s’en approcher.

 — Que le diable confonde
 Le chasseur et ses chiens !

Cria-t-il, en jurant comme bien des chrétiens,
 Cette eau-là n’est pas illusoire,
 Et je vais boire
 À la santé de ces gredins
 Qui font là-bas du tintamarre.

Puis, en disant ces mots, il sauta dans la mare.
 Comme il n’était pas de gradins
 Et que la côte
 Était abrupte et haute,
 L’imprudent ne put revenir.

Quand une passion nous presse, nous obsède,
 Hélas ! bien trop souvent l’on cède
Sans demander comment cela devra finir.

Livre V, fable 10




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