Le Temps et l'Amour Louis-François Jauffret (1770 - 1850)

Ce vieillard qui, d'un vol agile, infatigable,
Erre en tous les climats et voyage sans fin,
Son sablier dans une main,
Dans l'autre, sa faux redoutable,
Le Temps (car, à ces traits vous l'avez reconnu),
Un jour, rencontra sur sa route
L'Amour, qui voltigeait tout nu :
Petit Dieu très malin sous un air ingénu,,
Archer insidieux, que la vertu redoute,
Enfant qui voit de loin., et feint de n'y voir goutte.
Le Dieu qui porte le carquois
Dit au Temps, d'une voix hautaine :
Cède le pas ; connais mes droits :
Le monde entier est mon domaine.
A mes caprices j e soumets
L'Olympe, aussi bien que la terre :
lie Dieu qui porte le tonnerre
Est le premier de mes sujets.
Le Temps lui répondit : sur tout ce qui respire
Ai-je des droits moins sûrs, et des titres moins clairs ?
Va, tout vieux que je suis, contre toi je conspire ;
Et ces cœurs dont tu crois composer ton empire,
Je les affranchis de tes fers.

Livre II, Fable 5




Commentaires