L'Enfant et l'Abeille Louis-Maximilien Duru (1804 - 1869)

Un jour, dans la belle saison,
Au temps où les zéphyrs caressent la verdure
Et contraignent les fleurs de briser leur prison,
Pour s’embellir de leur noble parure,
Un jeune Enfant chassait au papillon ;
Aux insectes plutôt, dans un riant vallon.
Au sein d’une rose vermeille,
Travaillait une active Abeille.
Le petit conquérant, charmé de ce butin,
(Peut-être ignorait-il le dard et sa piqûre),
Doucement vient, se penche, étend la main,
Saisit l’Abeille ; mais soudain
La rejette : le dard a creusé sa blessure,
Et puis, voilà des cris, des pleurs.
— Mouette maudite, je le jure,
Mouche qui fais tant de douleurs,
Je te rendrai bien ton injure !
— J’ai puni ta témérité,
Reprit-elle à son tour ; mais que l’expérience
De ce châtiment mérité
Guérisse ta folle imprudence.
Si j’ai mon dard contre mes ennemis ;
Suis-moi : là-bas, vers la fontaine,
Mon miel, dans le creux d’un vieux chêne,
Coule à flots d’or pour mes amis. —

Ne murmurons jamais alors qu’on nous châtie.
La main qui quelquefois nous arrache des pleurs,
Pour corriger nos travers et nos mœurs,
Avec sagesse à notre vie
Sait préparer de réelles douceurs.

Livre I, fable 8




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