La Femme conséquente avec son Mari Marie-Amable Petiteau (1736 - 1816)

— Femme, réprimez cette grande gaîté
Qui vous mène à l’étourderie.
— Mon mari, renoncez à celte austérité
Qui vous conduit à la misanthropie.
— Suivez, ma femme, aussi mon plan d’économie ;
Retranchez vos excès de prodigalité :
Car tous les jours, bon Dieu ! l’argent devient plus rare.
— Vous ne verriez en moi que générosité.
Mon cher, si vous étiez tant soit peu moins avare.
— Détachez-vous encor des jeunes élégants
Dont le jargon repaît votre coquetterie.
— Ayez pour moi ces soins et tendres et touchants,
Et je m’interdirai la moindre agacerie.
— Oh ! pour le coup ! quittez votre ton suffisant
Qui, contre vous, chaque jour me courrouce.
— Corrigez votre emportement,
Comme un agneau je serai douce.
— Mais apprenez, madame, enfin,
Que de votre sort, de votre être,
Je suis absolu souverain :
Le ciel me créa votre maître.
De lui, l’homme a reçu le don
De la force et de la raison,
Pour protéger la femme, en tout point la conduire,
Et, quand elle résiste à ses lois, la réduire.
Joli caquet, douceur, appas, c’est, en un mot,
Tout votre lot.
— Par ce vieux conte, hélas ! mon cher, on vous abuse.
Que vous êtes inconséquent !
Si toute la raison est à lui seulement,
L’homme est, pour nos défauts, forcé d’être indulgent,
Et tous les siens n’ont plus d’excuse.





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