Les Singes et l'Oiseau Pantchatantra

Il y avait dans un endroit d’une montagne une troupe de singes. Un jour, dans la saison d’hiver, ces singes tremblaient de tout leur corps par suite d’un vent très-rude qui soufflait contre eux; ils étaient frappés par la chute d’une forte averse de pluie violente et de neige, et ne trouvaient aucun repos. Or quelques singes amassèrent des fruits de goundjâ, pareils à des étincelles de feu, se mirent tout autour et soufflèrent par désir d’avoir du feu. Cependant un oiseau nommé Soûtchîmoukha, voyant la peine inutile qu’ils prenaient, dit : Hé ! vous êtes tous des fous. Ce ne sont pas des étincelles de feu; ce sont des fruits de goundjâ. Par conséquent, à quoi bon vous fatiguer en vain ? Avec cela vous ne vous préserverez pas du froid. Cherchez donc quelque endroit de la forêt abrité contre le vent, ou une caverne, ou une grotte de montagne. Aujourd’hui encore se montrent de gros nuages. Alors un vieux singe d’entre ceux-ci lui dit : Hé, sot ! qu’est-ce que cela te fait ? Tais-toi donc. Et l’on dit :
Que celui qui a du jugement n’adresse pas la parole à quelqu’un souvent arrêté dans ses occupations, à un joueur qui a perdu, s’il désire son propre bonheur.

Et ainsi : Le fou qui adresse la parole à un chasseur qui s’est donné une peine inutile, à un sot qui est dans le malheur, s’attire un affront.

Mais l’oiseau, sans faire cas de lui, répétait continuellement aux singes : Hé ! à quoi bon une peine inutile ? Et comme il ne cessait nullement de parler, un singe, en colère de s’être fatigué en vain, le prit par les ailes et le frappa contre un roc, et l’oiseau mourut.

Voilà pourquoi je dis : Un bois inflexible ne se courbe pas; un rasoir n’a pas d’action sur une pierre. Considère Soutchtmoukha : on n’enseigne pas celui qui ne veut pas être instruit.

Et ainsi : En effet, un avis irrite les sots et ne les calme pas : le lait bu par des serpents ne fait qu’augmenter leur venin.

Et aussi : Il ne faut pas donner un avis à tout individu quel qu’il soit. Vois : un sot singe priva de maison celle qui avait une belle maison.

Livre I, 17


On remarque les morales multiples.

Commentaires