Un paisible ruisseau coulait limpide et pur,
Et comme en un miroir, dans ses eaux fugitives,
Du ciel réfléchissait l'azur,
Et les fleurs qui paraient ses rives.
Un villageois survient et s'assied sur le bord.
Armé d'un long bâton, il se met tout d'abord,
En homme désœuvré qui cherche à se distraire,
A troubler cette onde si claire ;
Au ruisseau cela fut fatal.
Soudain à la surface on voit monter la fange,
Et des eaux le brillant cristal
En flots noirs et bourbeux se change.
Quelle est cette occupation
Demandai-je à cet homme ? A cette question,
Malignement il se prit à sourire :
Ce que je fais, dit- il ? puisqu'il faut vous le dire,
C'est une révolution.
Je crus qu'il se moquait, et le lui fis entendre.
Un moment, reprit- il, voulez-vous bien attendre ?
Vous serez convaincu de ce que je vous dis.
Par complaisance j'attendis.
Voyez, dit-il après un moment de silence,
Le ruisseau n'est plus agité ;
Avec le calme et la tranquillité,
Il a repris sa transparence,
Et rien ne trouble plus son cours ;
La fange, qui naguère était à la surface,
Est redescendue à sa place.
En révolution, c'est ce qu'on voit toujours.