Ni noir, ni blanc Pierre Bergeron (1787 - 18??)

Je rêvais, cette nuit, que j'avais pris pour femme
Une négresse du Congo ;
Que la nature avait, à l'égard de la dame,
Fait un singulier quiproquo ;
Car un enfant qui vint au monde,
A nul autre ne ressemblant,
Avait, ô surprise profonde !
Un côté du corps noir, et l'autre côté blanc.
Chacun de visiter ce rare phénomène.
Celui qui le voyait à droite et de profil,
L'enfant est nègre, disait-il,
Et nègre d'un beau noir d'ébène ;
Mais qui le regardait à gauche et de côté,
C'est un européen d'une blancheur d'albâtre,
Répliquait-il d'un ton d'autorité
Dont il ne voulait rien rabattre.
Hélas ! le plus grand embarras
Était pour ceux qui le voyaient en face ;
Car le placer dans l'une ou l'autre classe,
En honneur, ils ne l'osaient pas...
Un bruit qui m'éveilla mit fin à cette histoire ;
J'en fus très enchanté, je le dis sans façon,
Et certe vous pouvez m'en croire ;
Car, après tout, un tel garçon
N'eût été bon qu'à montrer à la foire.
Or ce prodige merveilleux
Vous semble peut-être incroyable ;
Eh bien, messieurs, un tout semblable
Peut se reproduire à vos yeux ;
Car supposez qu'un publiciste,
Travaillant sur un nouveau plan,
Du pouvair, chaque jour, soit le panégyriste,
Et, par calcul ou faux-semblant,
En même temps l'antagoniste :
Ce sera mon poupon qui n'est ni noir, ni blanc.

Fable 44


Je ne saurais pas quoi dire sur ce texte, pour le moins ambigu... D'ailleurs, je ne comprends pas du tout la morale. Que vient faire ici ce "publiciste" ?

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