Un cheval vit un jour sur un chemin de fer
Une machine énorme, à la gueule enflammée,
Aux mobiles ressorts, aux longs flots de fumée.
En vain, s'écria-t-il, ô fille de l'enfer !
En vain tu voudrais nuire à notre renommée.
Une palme immortelle est promise à nos fronts,
Et toi, sous le hangar honteuse et délaissée,
Tu pleureras ta gloire en naissant éclipsée.
De vitesse avec moi veux-tu lutter ? — Luttons !
Dit la machine ; enfin ta vanité me lasse,
Elle roule, elle roule, et dévore l'espace ;
Il galope, il galope, et d'un sabot léger
Il soulève le sable et vole dans la plaine.
Mais il se berce, hélas ! d'un espoir mensonger !
Inondé de sueur, épuisé, hors d'haleine,
Bientôt l'imprudent tombe et termine ses jours ;
Et que fait sa rivale, elle roule toujours.
La routine au progrès veut disputer l'empire ;
Le progrès toujours marche, et la routine expire.