L'Éléphant et le Veau Prosper Wittersheim (1779 - 1838)

À force de souplesse, un veau
Au plus grave éléphant sut se rendre agréable.
Pour s'élever à son niveau,
Il affectait d'en être inséparable,
Parlait partout de leurs liens constants,
Et ne jurait que par ses dents.
L'idiot ignorait qu'en publiant sans cesse
Que l'éléphant est son ami,
Il en rabaissait la noblesse.
Un sot, jamais, dans sa bassesse,
Ne nous compromet à demi.

Les animaux riaient, et, du veau ridicule,
Entre eux médisaient sans scrupule.
« Vous verrez, leur dit le renard,
Que cette amitié n'est point franche ;
Un nigaud peut bien, par hasard,
Mettre un bel esprit dans sa manche ;
Mais il ne peut longtemps cacher sa nullité,
Et, dès lors, plus d'intimité. »

Un jour, dame lionne, une fort noble dame,
À l'éléphant lançait une line épigramme,
Sur son fidèle ami le veau.
« Mon ami ! répond-il ; eh ! le trait est nouveau !
— Mais, vos affections ne sont que trop prouvées...
— Bah ! c'est un sot, heureux de faire mes corvées !..

Livre VI, fable 6




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