Le Léopard et les Chiens Prosper Wittersheim (1779 - 1838)

Farouche, soucieux et sombre T
Un léopard, haï, craint, détesté,
Défiant, agitait dans l'ombre
Un sceptre ensanglanté.

Avec un dogue, un de ses vils complices,
Lâche esclave de ses caprices,
Il visitait un matin ses forêts.
A son aspect une terreur panique
S'empare de tous ses sujets,
Et chacun fuit devant son prince inique.

Un tout petit chien imprudent
Après le tyran court, aboie.
« Faut-il, seigneur, dit le dogue en grondant,
Que dans l'instant je le foudroie ?
— Veux-tu, par une telle proie
Abaisser ma grandeur ?
Passons, méprisons l'aboyeur ! »
Et fièrement il passe.

petit chien dit : « Bon, courage ! faisons face ;
Venez, mes frères,-mes amis ! »

Encouragés par cette audace,
Par fimpunité raffermis,
Deux, quatre, dix, cent chiens de chaque race
Subitement sortent des bois,
Sur le léopard, à la fois,
Avec fureur se jettent,
Puis, en le déchirant,
Tous ensemble répètent :
« Mort au tyran ! »

Hélas ! dit en mourant le prince,
En son sang tout baigné,
n'est point d'ennemi si mince
Oui soit à dédaigner. »

Livre V, fable 17




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