L'âne vit le grillon se hâtant sur la route.
« Viens goûter, lui dit-il, cette herbe que je broute.
— Merci, l'on m'attend quelque part,
Et je craindrais d'être en retard.
—C'est un festin? dit l'âne. Et le grillon réplique :
—Non, c'est un concours de musique
Où je suis invité ; je peux
T'y présenter, si tu le veux.
—La musique?... Que veux-tu dire?
—C'est un art dont l'homme s'inspire
Pour exprimer les sentiments
Les plus majestueux comme les plus charmants.
C'est l'harmonie,
C'est un écho des cieux,
C'est le chant du génie...
Et croît-il des chardons dans ce champ merveilleux?
Demanda le baudet en relevant la tête.
—Benêt! dans un salon?...
— Mais alors qu'y fait-on ?
Ce doit être bien bête !
Tiens ! moi, pour ta musique et toutes tes chansons,
Je ne donnerais pas un seul de mes chardons.»
Combien de sots on peut entendre
De l'âne partager les goûts!
Mais c'est vouloir qu'on se moque de nous
Que de prêcher des gens qui ne peuvent comprendre.