Cartouche, vilain petit chien,
Et de plus coureur et vaurien,
Par un soir de décembre allant à l'aventure,
Sans penser à rien, se laissa
Surprendre par la nuit obscuré,
Et tant de loin en loin trotta qu'il s'égara.
Réduit à coucher sur la dure
(Notez qu'à pierre fendre il gelait ce jour-là),
Tandis que de froid il grelotte
Et fait sur ses écarts un retour sérieux,
Voilà qu'à deux cents pas, ô clémence des Dieux !
Il entend dans une gargote
Éclater des rires joyeux.
Comme on juge, y courir d'un moment c'est l'affaire,
Et notre hardi malotru
Bientôt s'y glisse inaperçu.
Mais pour atteindre au feu maintenant comment faire ?
De vingt buveurs assis la chaîne circulaire
En clôt tous les abords, sauf un coin tout petit
Où, paisible à côté de son propriétaire,
Un bon gros paquet s'est blotti.
« Foin ! pour ce franc dadais la place n'est pas faite ;
Ça, voyons, ôte-toi de là que je m'y mette ! »
Souffle à ce dernier le roquet...
Point de réponse : en son plein somme
Le paquet vient d'entrer justement et dort comme
D'habitude dort un paquet.
Qu'avise alors notre rusé Cartouche ?
<« Dieu sait, dit-il, combien dormira le lourdeau ;
Je perds ici mon temps, faisons mieux... » Aussitôt
Lestement sur le dos il lui saute et s'y couche.
Sans mettre personne en avant,
Dans certaine antichambre, où l'intrigue pullule,
J'ai vu plus d'un jongleur, de mon Cartouche émule,
Aux autres sur le dos sauter en arrivant.