Une coquette qui vieillit,
Dites-vous , ce n’est rien; moi je dis : C’est dommage ;
Croyez qu’il est plus d’un esprit
Par une coquette fait sage.
Une coquette donc voulait se rajeunir,
Je dis sa beauté seule , et c’était sa folie :
Quand l’âge vient, tout doit vieillir ;
Tel est le sort de ce qui reçut vie.
Hélas! qui veut en convenir?
Pour adoucir sa figure ridée,
Elle prend tout moyen qui lui vient dans l’idée.
Ayant appris qu’un empereur romain ,
Pour conserver la beauté de son teint,
Et du temps prévenir l’outrage,
Habillait dans la nuit d’une couche de pain
( Rien n’est plus vrai ) son auguste visage :
Elle enduisait d’une pâte au jasmin
Sa figure de parchemin.
Rien ne réussissait; lait, blanc d’œuf, herbes fines,
Tout lui donnait la plus triste des mines.
Une daine de qualité
Vint lui dire un jour à L’oreille :
Pour embellir, d’un remède vanté
Je connais la recette : ah ! c’est une merveille !
Je vous la donnerai; mais chut ! un grand secret;
Il faut en tout être discret.
Dans le terroir de l’antique Narbonne ,
Dans ce climat favorisé du ciel,
L’abeille va pomper un miel
Qu’au doux printemps chaque (leur donne ;
Ce miel, dit-on , a la propriété
De redonner l’éclat de la beauté.
Elle a bientôt ce miel, la petite friponne ;
Elle en couvre la nuit sa figure et ses mains :
Lecteurs, disposez-vous à rire ;
Soudain les moucherons qu’on appelle cousins
Surviennent en nombreux essaims,
Et lui font souffrir le martyre,
Suçant avec le sang le meilleur des butins.
Vanité ! vanité ! que sot est ton empire !