La Vieille et les deux Servantes Charles Beaulieu (19ème)

Que les temps sont changés, allait toujours disant
Une vieille à ses deux servantes ;
Ah ! l'on ne voyait pas, comme on voit à présent,
Tant de maîtresses mécontentes,
De mon temps : au contraire, au travail, ouvriers
Etaient constamment les premiers,
Et les maîtres prenaient leur aise ;
Si cela continue et, ce qu'à Dieu ne plaise,
Les choses de ce train marchent à l'avenir,
On finira bientôt par ne plus y tenir.
C'était ainsi qu'à ses deux chambrières,
Et filandières,
Notre vieille prêchait du matin jusqu'au soir :
Les commères sans s'émouvoir,
De tout son bavardage,
Ni plus ni moins d'ailleurs n'en mangeaient, n'en dormaient
Surtout n'en travaillaient.
Enfin pour exciter leur zèle et leur courage,
Quelqu'un lui conseilla d'employer le moyen
De partager le gain avec ses ouvrières ;
Elle adopta ce plan et s'en trouva très bien,
Car depuis, nul besoin d'éveiller les premières.

On ne saurait douter
Qu'intéresser les gens au profit d'une affaire
Est le plus sûr moyen pour les faire hâter,
Et surtout pour les porter
A bien faire.

Livre V, fable 6




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