Roi d'un empire puissant,
Un lion d'un cœur débonnaire
Pour héritier n'avait qu'un seul enfant ;
Ile chérissait en vrai père ;
Il cultiva ses jeunes ans
Avec une tendresse extréme.
Heureux dans son enfance, heureux dans son printemps, -
(Peut-on ne l'être pas quand un père nous aime! )
Conserva-t-il un cœur reconnaissant ?
Voyons la fin : devenant grand,
Notre jeune prince désire
Une petite portion
Du vaste empire.
Le père satisfait à son ambition.
Fut-il content ? Il devint plus avide :
Encore ce petit bosquet,
Encor la voisine forêt
Ou notre majesté réside.
Le père accorde tout ; cependant il vieillit,
Et de lui-même enfin mon prince s'agrandit.
Un jour que le vieux roi succombait de faiblesse,
«O mon fils ! lui dit-il, pourquoi, sur mes vieux jours,
Oubliant toute ma tendresse,
Je vous vois ravageant, envahissant toujours ?
Mes états ne sont plus qu'une petite terre ;
Laissez-moi du moins ce secours!»
Le fils est sourd a sa priére;
Que dis-je! il en est furieux.
« Allez, lui repart-il, rejoindre vos aïeux ;
Vous avez assez loin poussé votre carrière. »
Le père fut forcé d'abandonner ces lieux,
D'aller au loin trainer son affreuse misère.
Dans les dons que tu fais, tendre et sensible père,
Songe qu'un jour tu seras vieux.