Le Lion et le Lionceau Simon Pagès (17ème siècle)

Roi d'un empire puissant,
Un lion d'un cœur débonnaire
Pour héritier n'avait qu'un seul enfant ;
Ile chérissait en vrai père ;
Il cultiva ses jeunes ans
Avec une tendresse extréme.
Heureux dans son enfance, heureux dans son printemps, -
(Peut-on ne l'être pas quand un père nous aime! )
Conserva-t-il un cœur reconnaissant ?
Voyons la fin : devenant grand,
Notre jeune prince désire
Une petite portion
Du vaste empire.
Le père satisfait à son ambition.
Fut-il content ? Il devint plus avide :
Encore ce petit bosquet,
Encor la voisine forêt
Ou notre majesté réside.
Le père accorde tout ; cependant il vieillit,
Et de lui-même enfin mon prince s'agrandit.
Un jour que le vieux roi succombait de faiblesse,
«O mon fils ! lui dit-il, pourquoi, sur mes vieux jours,
Oubliant toute ma tendresse,
Je vous vois ravageant, envahissant toujours ?
Mes états ne sont plus qu'une petite terre ;
Laissez-moi du moins ce secours!»
Le fils est sourd a sa priére;
Que dis-je! il en est furieux.
« Allez, lui repart-il, rejoindre vos aïeux ;
Vous avez assez loin poussé votre carrière. »
Le père fut forcé d'abandonner ces lieux,
D'aller au loin trainer son affreuse misère.
Dans les dons que tu fais, tendre et sensible père,
Songe qu'un jour tu seras vieux.

Livre III, Fable 25




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