Une taupe de qui les yeux
N'aperçurent jamais le disque radieux
De cet astre dont la lumière
Ranime et réjouit la terre,
Un beau jour de printemps au soleil se chauffait,
Et tout en se chauffant, elle philosophait.
« Du soleil et de ses merveilles
Chaque jour, disait-elle, on rebat mes oreilles ;
Mais pour croire à tous ces propos,
Grâces au ciel, je suis trop sage.
Ce globe étincelant, et sur lequel les sots
Font un si pompeux étalage,
N'est qu'un fantôme vain qui n'exista jamais :
S'il existait, je le verrais. »
« Je ne puis, dit un aigle, excuser ta démence.
Du soleil il est vrai que la magnificence
Se dérobe à tes yeux couverts d'un voile épais ;
Mais, ingrate ! peux-tu nier son existence,
Quand tu jouis de ses bienfaits ? »
Note de l'auteur : Je sais que les naturalistes ne conviennent pas de la complète cécité de la taupe ; mais il n'est pas impossible que parmi ces animaux il se trouve quelquefois, comme parmi les autres, des individus complétement aveugles, et même aveugles-nés.