Le lion, plein de courage,
L’aigle, au vol audacieux,
D’un roi ne m’offrent point l’image :
Tous deux ils vivent de carnage,
Et leur règne m’est odieux.
Des sujets innocents, soumis et sans reproche,
Comme des criminels, tremblent à leur approche :
Je ne vois pour eux nul recours ;
Vainement de la fuite ils cherchent le secours :
Ces cruels ont bientôt immolé leurs victimes ;
Par le meurtre et le sang ils soutiennent leurs droits,
Droits affreux, droits illégitimes :
Ce sont des tyrans, non des rois.
Mais déjà distingué par son brillant plumage,
Le coq semble fait pour régner.
Tout monarque qui veut sagement gouverner
Doit faire un noble apprentissage
Sous ce fier animal pacifique et guerrier.
Symbole de la vigilance,
Il semble occupé tout entier
A faire régner l’abondance
Parmi ses sujets emplumés :
Ils l’aiment tous, tous ils en sont aimés ;
Et le bon ordre est encor son ouvrage.
Mais si contre un voisin jaloux et turbulent
Il faut combattre, il le fait vaillamment :
L’amour de ses sujets enflamme son courage ;
L’ambition, l’orgueil, ne le guident jamais.
Avec feu s’il soutient la guerre,
C’est qu’à ses périls il espère
Rendre aux siens alarmés les douceurs de la paix :
Enfin, il est plutôt leur ami que leur maître.
Lui seul est roi, lui seul il est digne de l’être.
Sire, si j’ai tracé les devoirs d’un bon roi,
Et si dans ce tableau, comme j’ose le croire,
Je n’ai rien oublié, je n’en ai point la gloire,
Car je l’ai tracé d’après toi.
Tes sujets vont te reconnaitre ;
Leur suffrage m’est assuré.
Du tien, Sire, je devrais l’être :
Mais ce suffrage désiré,
Je crains bien que ta modestie
Ne m’empêche de l’obtenir ;
Et c’est assez pour moi que tu daignes remplir
Les vœux ambitieux de ma muse hardie
En agréant l’essai qu’elle ose ici t’offrir.