Que fais-tu ? Rien du tout ; tu perds tous les instants,
Disait la Poule nonchalante,
Abeille, vrai Roger-ron-Temps,
Ta diligence négligente
N'a pour objet que le plaisir.
Va, respire à ton gré les parfums de la Rose ,
Plane sur l'Anémone, ou sur l'OEillet repose ;
Ce n'est pas un emploi difficile â remplir :
J'en ferais bien autant si j'étais à ta place.
Réjouis-toi, grand bien te fasse,
Et tu le peux, grâce à mes soins :
L'Homme de ton secours sait se passer encore,
Il suffit que pour ses besoins
Je ponde chaque jour au lever de l'Aurore.
L'Abeille repartit, pourquoi m'injurier ?
Tu ne me connais pas et veux m'apprécier !
Mais tu fais plus de bruit et non pas plus d'ouvrage !
À quoi bon clabauder, jaser autant que neuf ?
Clapir, s'égosiller et le tout pour un œuf ?
Je hais le faste et l'étalage,
La Ruche parle assez pour moi ;
Elle montre combien je l'emporte sur toi.
Mon travail aux humains est-il moins nécessaire ?

Je compose pour eux 8c la cire 6i le miel,
Jc les nourris, je les éclaire.

Cc n'est pas tout encore, 8c j'ai reçu du Ciel
De quoi punir tout Censeur téméraire -,
Crains l'aiguìllon, laisse-mot vivre en paix.
Cet avis ctoit salutaire,
U rabattit tous les caquets.

Livre II, fable 15




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