Le Milan et les Pigeons Claude-François-Félix Boullanger de Rivery (1725 - 1758)

Se fier aux méchants, c'est courir à sa perte ;
Phèdre à qui nous devons ce précepte important
Prouve aussi que la ruse obtient en un instant
Ce que n'a pu la force ouverte.

Un jour Milan-Caligula
Au bec retors, à la langue dorée,
Poursuivait les Pigeons dans la plaine éthérée
Et ne pouvant les joindre , en ces mots leur parla.
Malheureux, quoi toujours vivre ainsi dans la transe,
Et ne jamais manger un grain en assurance !
Arrêtez, arrêtez, vous me faites pitié,
Et je vous tends la ferre en signe d'amitié.
Tandis que vous pourriez être toujours tranquilles.
Et la terre et les airs n'ont point pour vous d'asyles!
Ne feriez-vous pas mieux si vous m'étiez soumis ?
Je livrerais bataille à tous vos ennemis,
Vous jouiriez par là d'une paix assurée ;
Seul j'en aurais les soins, vous en auriez les fruits,
Autrement vous ferez tôt ou tard ma curée,
Le Papelard fut cru, grand-merci lui dit-on ;

En Monarque il fit son entrée
Dans Colombapolis et le Peuple Pigeon
Lui remit aussitôt la suprême puissance ;
Sire Milan premier du nom
Vous les croqua pour récompense.