Certain Académicien,
Homme d'esprit d'abord, la chose va sans dire,
Et puis, ce qui vaut mieux peut-être, homme de bien... -
Peut-être qu'est-ce là ? Mais, le savoir-écrire
Vient, certes, fort après le savoir-vivre. - Hé bien,
D'accord, mon beau Censeur ; parlons de l'honnête homme
D'autant que le Lettré n'entre, en ceci, pour rien
Que pour mémoire ; et sachez comme
Il était indulgent. Cet Ange de bonté,
Dieu, qui, par de grands maux, éprouve ceux qu'il aime,L'avait, sur ses vieux ans, frappé de cécité,
Sans que, depuis ce mal, sa douce aménité
Eût, un instant, cessé d'être la même.
Un jour que, je ne sais ni pourquoi, ni comment,
Il cheminait au milieu d'une foule,
Tout aussi ballotté qu'un vaisseau, sans gréement,
Le pourrait être en mer, au milieu d'une houle,
Il marche sur le pied d'un Jeune Homme ; et, tout net,
L'insensé lui donne un soufflet !...
Ah ! de m'avoir frappé, dit le Vieillard, sans doute
Vous aurez, Monsieur, bien regret :
Je suis aveugle !... Et, de suivre sa route...
Et, moi, de dire à qui m'écoute :
Est-il un mot plus généreux !
Quant à vous, Jeunes Gens à l'âme atrabilaire,
Vous, que le moindre heurt, fût-il involontaire,
Jette en des transports furieux,
Oh ! frapper un Vieillard, c'est un acte odieux !
Mais, faire tête à la Colère,
Est-ce un effort si grand ? Non ; lorsqu'il aviendra
Qu'au souffle impur de la Mégère,
A mal votre âme tournera,
Dites-vous : Dieu me voit !... Il n'est, je vous l'atteste,
Il n'est fille d'Enfer, dont le pouvair funeste
Ne doive se briser contre ces trois mots-là !