Dans une basse-cour la paix souvent troublée
N'est pas facile à maintenir ;
Même dans nos climats la guerre est allumée
Entre les coqs : qu'ils voient rougir
Une crête de poule, aussitôt se hérisse
La plume de leur cou ; l'ergot
Pointu de leur talon frémit, et dans la lice
Les champions vont faire assaut.
Jugez ce que doit être aux pays chauds la lutte
Entre ces coqs au sang brûlé !
Ils se battent à mort ; le vaincu dans sa chute
D'un cri sauvage est salué.
Et les poules aussi : vaniteuses, colères,
Pour un rien se prenant de bec,
Caquetant, piaillant comme des harengères,
La pintade, d'un ton très sec,
Jetant son couac de fausse clarinette,
Le hocco noir et le paon vert
Font un charivari à vous fendre la tête,
C'est un enfer ! c'est un enfer !
De même qu'en la rue, un bon sergent de ville
Met le holà, fait circuler
Les pochards batailleurs, et fait suivre la file
Aux cochers prompts à s'empoigner,
Là-bas un oiseau gris se charge de ce rôle :
Un petit dindon, l'Agami,
Se tient calme en son coin, mais dès qu'une parole
Un peu trop risquée, entre amis,
S'échange, le voilà qui dresse ses oreilles ;
Si l'on se bat, d'un coup de bec
Séparant les mutins, pour l'ordre il fait merveille,
De la basse-cour c'est le cheik,
Et grâce à lui l'on peut dormir des deux oreilles.
À la basse-cour, à la ville,
Respectons le sergent de ville.